Hubert Reeves : « où allons-nous » ?
« L’humanité se trouve à une étape cruciale de son existence, car les choix relatifs à la planète sont faits aujourd’hui, sont d’importance critique pour les forêts, les océans, les fleuves, les montagnes, la flore et la faune sauvages et les autres systèmes qui rendent la vie possible pour les générations futures… »
Cet extrait du rapport sur
l’avenir de l’environnement mondial, de l’ONU, exprime les priorités de chacun
dans l’univers dans lequel il se circonscrit. Hubert Reeves, les 5 et 12 mars
derniers, a rappelé lors de deux conférences à Paris les enjeux majeurs de
notre avenir.
La première séance était
consacrée à la réponse que nous cherchons tous : « d’où
venons-nous ? ». L’astrophysicien a tenu à nous rappeler que la
théorie du Big Bang est jusqu’à aujourd’hui la plus plausible. En gros, le
monde était concentré sur lui-même et aurait explosé. Aujourd’hui, on estime
que l’univers comprend 100 milliard de galaxies, contenant chacune 100
milliards d’étoiles. Nous ne savons pas si nous sommes seuls dans l’univers,
tout simplement parce que nous n’avons de preuves, ni dans un sens, ni dans
l’autre.
Donc a priori, pour le
moment, nous ne pouvons pas aller vivre sur une autre planète, ni attendre des
extra-terrestres une recette miracle pour sauver la Terre. Il faut donc penser
à l’avenir de la vie sur Terre. C’est ce volet qu’Hubert Reeves a
particulièrement développé lors de sa seconde intervention.
Tout d’abord : une
question simple. Pourquoi n’avons-nous pas été confronté plus tôt au problème
de la planète en danger ? Pourquoi nous alarmer maintenant ?
Il y a deux raisons
principales. La première, c’est que la population est de plus en plus
importante. Elle ne cesse de croître, mais pas l’espace disponible. La seconde,
c’est l’impact de l’industrie humaine. Il y a un siècle, il n’était pas aussi
fort sur l’environnement. Aujourd’hui, on ne peut plus négliger ses
conséquences. Il convient de voir ce qui ne va pas point par point.
· Le
pétrole.
En cent ans, on a brûlé
mes réserves de pétrole que la Terre avait mis cent millions d’années à
produire. Nous devons donc dès à présent penser à l’après pétrole. Pour le
moment, le problème est que l’atmosphère est rempli de gaz carbonique. Cela
entraîne directement une hausse de la chaleur. Ce qui est grave, ce n’est pas
la hausse de la température elle-même. En effet, personne n’a rien contre le
fait de gagner quelques degrés, notamment dans nos climats tempérés. Nous
comptons gagner entre 2 et 5 °C d’ici la fin du siècle. Ce qui est grave, ce
sont les effets secondaires du réchauffement.
Le Groupement
international d’études sur le climat (GIEC) regroupe 2500 scientifiques de tous
pays. Ce groupe est chargé d’observer et de tirer les conclusions nécessaires
sur le climat. Ces scientifiques garantissent que la hausse de la température
est bien due, pour la majorité, à l’industrie humaine. Il n’est donc plus
possible de prétendre le contraire, et que ce que nous vivons est purement
naturel. L’Homme est en grande partie responsable des évolutions de son
environnement.
Une preuve assez
tangible : les assureurs ne veulent plus assurer les gens qui
s’établissent au bord de l’eau, car le risque de catastrophes naturelles est de
plus en plus élevé. La fonte des glaces est présente, et plus rapide que ce
qu’on avait prévu. Cela pose des problèmes de biodiversité, mais aussi de la
montée des eaux.
· La
forêt mondiale
L’humanité a détruit plus
de la moitié de la forêt mondiale. Aujourd’hui, en Indonésie, au Congo et en
Amazonie principalement. Bien évidemment, cela est du à l’augmentation de la
population, qui a besoin de plus d’espace, et à la nécessité d’infrastructures.
Outre la pollution que cela engendre, il ne faut pas négliger le
dysfonctionnement dans l’altération de l’oxygène, vital pour chaque être
humain.
· Erosion
de la biodiversité
Près de 50 % des espèces
auront disparu d’ici à la fin de ce siècle. Par exemple, on pêche plus de
poissons qu’il ne s’en reproduit. Seules les espèces qui ont la faculté de
résister au changement, comme cela a été le cas durant toute l’évolution. Qu’en
est-il de la notre ?
La vie est très stable
depuis son apparition et va résister. Elle a su le faire pendant 600 millions
d’années. A l’heure actuelle, les êtres humains sont en en train de créer la
sixième extinction. Sa caractéristique, ce qui fait que celle là est
différente, c’est que les être humains sont responsables dans ce cas précis. De
plus, la race humaine est une victime potentielle de l’extinction qu’il a
lui-même engendrée.
A ce jour, nous pouvons
envisager deux scénarios :
- la
disparition de l’espèce humaine. Il s’agit bien évidemment de l’hypothèse que
nous voulons éviter.
- L’espèce
humaine sera encore présente après la sixième extinction. C’est vers cette
possibilité que nous travaillons, et vers celle là que nous devons faire des
efforts.
Finalement, outre
l’instinct de survie qui nous gouverne tous, pourquoi l’espèce humaine, qui a
réussi à s’auto détruire, mériterait-elle d’être sauvée ?
Selon Hubert Reeves,
l’humanité mérite quand même de s’en sortir. Les humains ont apporté des choses
qu’aucune espèce n’a su apporter.
- Art
et la culture. Tout ce qui ont ce sujet en philo, savent que l’art est
indispensable à la vie de chacun, quoi que l’on puisse croire au premier abord.
Que serait notre vie, sans musique, sans cinéma, sans théâtre, sans peinture,
sans danse, etc… ? Cela montre également la capacité humaine à réfléchir
sur elle-même.
- La
science. En effet, si nous en arrivons à de telles conclusions, ce n’est pas
anodin. L’intelligence humaine a ses revers, mais la science nous sert
considérablement.
- L’empathie,
la compassion. Nous sommes effectivement la seule espèce à ne pas pratiquer la
sélection naturelle. Pour comprendre, un exemple simple. Lorsqu’on oisillon
naît et tombe malade, les parents vont obligatoirement arrêter de le nourrir.
Celui-là est considéré comme trop faible pour continuer à vivre. Ils ne font
donc aucun effort pour le sauver. La sélection naturelle joue son rôle. Pour un
être humain, les choses sont tout autres. Dès le départ, nous avons une vision
différente des autres de notre espèce. En cela, nous pouvons considérer que
l’espèce humaine peut se sauver.
Des organismes veillent à
la préservation de la nature, comme la ligue ROC, présidée par Hubert Reeves.
Ses objectifs principaux sont de préserver la faune sauvage, faire reconnaître
le statut d’être sensible à tout animal, et défendre les droits et les intérêts
des non-chasseurs. Cette association a été reconnue d’utilité publique.
Pourquoi sauver la biodiversité ? « Parce que chaque espèce
est le résultat et l’aboutissement d’une évolution biologique qui s’étend sur
des millions et des milliards d’années. » Tout
de suite, on voit les choses différemment…
A l’heure actuelle, la
Chine vient de lancer un plan draconien pour protéger l’environnement.
L’écologie est au cœur de la campagne présidentielle française. Les
scientifiques sont en train de demander au gouvernement américain que l’ours
polaire soit mis sur la liste des animaux en voie de disparition. Cela impliquerait
donc pour eux de réduire leurs gaz à effets de serre, et à faire de réels
efforts pour la protection de l’environnement. Seront-ils enfin signataires du
protocole de Kyoto ? La réponse pour la sauvegarde de l’ours est attendu
pour la fin de l’année 2007. Et si l’écologie était au cœur de la prochaine
campagne américaine ?